M’enivrer.
Plus que jamais mais pourtant sans abuser de ce rosé dont je me resservais allègrement. Non pas cette fois-ci, car tout était différent, incompréhensible et beaucoup trop intense. Je n’entendais plus que des échos autour de moi et les rires flottaient au dessus de cette longue tablée. Cette soirée n’avait rien d’ordinaire, elle était folle, unique, magique et totalement imprévisible. J’aime l’imprévisible, j’aime son talent de comédien quand il nous fait porter des masques où tout à l’air si normal, mais cachés derrière nos sourires une excitation des plus saisissantes venait tromper les apparences. J’étais là sans être là, happée toute entière par une ivresse nouvelle. Je me souviens juste de ce sourire placardée sur mon visage comme pour trahir une impatience des plus palpables. Car au fond de nous c’était l’effervescence, inexplicable incandescence, et nos deux cœurs battaient la chamade. Rien de tout cela n’était perceptible aux yeux de tous mais dans l’invisible nous deux savions, cette soirée était spéciale puisque nous nous retrouvions. Je m’enivrais alors de ce que je vivais à cet instant même, de ce moment qui ne reviendra plus et de sa saveur si particulière. Nous étions là sans être là, présents au milieu de tous mais liés par une force inexplicable, nos âmes elles avaient déjà rejoint une toute autre fête. Alors dans l’insouciance et l’excitation des retrouvailles nos verres trinquaient et nos cœurs se laissaient surprendre, encore et encore, toujours plus à chaque seconde. M’enivrer sans compter, sans retenue et sans chercher à contrôler ce que je ressentais, puis perde définitivement l’équilibre dans ce jeu subtil et déroutant où nos regards brûlants de désirs se croisaient enfin. On ne pouvait plus fuir, nous étions là, l’un devant l’autre. D’ailleurs pourquoi fuir ? C’est indécent de fuir même lorsque la peur s’invite, cela devenait impossible de toutes évidences. Tout mon corps tremblait, je n’étais décidément plus vraiment là, c’était irréel ce que je ressentais, insaisissable. A cet instant je m’enivre de chaque effluve de ce bonheur étrange et soudainement je trébuche, mes pensées s’emmêlent les pinceaux, mon cœur a la tête qui tourne. L’alcool n’y est pour rien pourtant j’en suis certaine ça y est, je suis ivre, ivre d’amour. Cet élan est beaucoup trop intense pour une seule âme et ce soir-là je sais pertinemment que tu la partages. Trop spécial, trop intense, trop enivrant, et il me devient alors impossible de dissimuler ce feu en moi, il me semble que tu n’y parviens pas non plus. Ne serait-ce pas cela les âmes Sœurs, ce nous incontrôlable ? Mon corps tout entier s’empare de ce trouble si nouveau et je lâche prise, pour la première fois. Ce soir là, cette rue populaire de Paris nous accueillait avec une magie inexplicable, et pour l’inoubliable. Ce soir-là deux adultes frôlant l’adolescence repartiraient ensemble, ils ne feraient plus semblant désormais, ivres d’amour à tout jamais.